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Takis Michas à La Tribune: "La sortie de la Grèce de la zone euro ne serait pas un désastre"

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Takis Michas. Copyright Elisa Perrigueur

 

Takis Michas est écrivain et journaliste grec. Ses articles sont publiés dans plusieurs médias grecs et internationaux, dont le Wall Street journal.

La Grèce est en panne. Son gouvernement avance tous les prétextes possibles pour ne pas s'attaquer au remboursement d'une dette publique qui s'élève à 350 milliards d'euros et représente quelque 165% du PIB. Ces derniers temps, on évoque la préparation des futures privatisations ou l'application de nouvelles augmentations de taxes... Cette situation dure maintenant depuis trois ans.

Et ce qui est sûr, c'est que rien ne changera dans l'immédiat. En réalité, ce sont les élections américaines qui dictent désormais l'agenda grec. En ce moment, les nouvelles en provenance de la Grèce sont moins négatives, le « Grexit » a disparu des débats, le programme de privatisations se veut plus modeste et plus réaliste... Car il s'agit avant tout d'éviter toute turbulence sur les marchés financiers qui aurait une influence négative sur le déroulement de l'élection américaine.

Dans un tel contexte, il ne serait donc pas surprenant que le rapport de la troïka des bailleurs de fonds internationaux (Commission européenne, BCE, FMI), dont la publication est très attendue, mais sans cesse repoussée, soit finalement divulguée au lendemain des élections outre-Atlantique qui se tiendront le 6 novembre 2012. Le contenu de ce rapport sera très intéressant à étudier, car il sera probablement très diplomatique, sans véritable fond, et saluera en conclusion les réformes déjà mises en oeuvre...Ce sont les bailleurs de fonds internationaux qui in fine décideront de voir le verre à moitié vide ou à moitié plein...

Actuellement, dans les médias, les relations entre le gouvernement et cette troïka sont présentées comme une sorte de conflit : la deuxième fixe des mesures, jugées mauvaises, qu'elle impose à un gouvernement qui tente d'en atténuer les effets négatifs. On parle de la « politique d'austérité » de la troïka, mais c'est un contresens. Son rôle ne consiste pas à définir la politique économique de Grèce, encore moins d'appliquer l'austérité ou de relancer la croissance économique.

Sa mission est d'aider la Grèce, aujourd'hui en faillite, à retrouver sa capacité à emprunter sur les marchés financiers. Aussi, parler de croissance ou d'austérité ne rentre pas dans le débat actuel. La priorité, répétons-le, est que l'Etat grec puisse le plus rapidement possible avoir accès à nouveau aux marchés.

Par ailleurs, contrairement à ce qu'ont répété des leaders européens comme Angela Merkel et François Hollande, une sortie de la Grèce de la zone euro, à condition qu'elle soit organisée dans le cadre d'un accord d'assistance avec les autres pays membres de l'euro, serait une bonne solution autant pour l'Union européenne que pour la Grèce.

En effet, tant que les entrepreneurs, locaux et étrangers, douteront de l'avenir du pays dans l'euro, ils n'investiront pas. A partir du moment où la Grèce sera officiellement sortie, cette menace sera levée. Les entrepreneurs reviendront. Les Grecs ayant placé leur argent à l'étranger pourront le réinjecter dans l'économie locale. En outre, pour retrouver de la compétitivité, la solution pour la Grèce est une dévaluation de la monnaie, ce qui est impossible avec l'euro.

Pour autant, cela ne devrait pas empêcher de mener à bien nombre de réformes, sur l'éducation, la fiscalité... Un tel processus prendra évidemment du temps. D'autant qu'il faudra convaincre l'ensemble des Grecs qui ne croient pas à l'impact positif de telles mesures sur leur vie quotidienne.

Enfin, pour l'Union européenne, une sortie de la Grèce ne serait pas une catastrophe. Le pays représentait à peine 2% du PIB de l'UE en 2011, alors qu'aujourd'hui la persistance du « problème grec » est le vecteur principal de l'insécurité en Europe et sur les marchés financiers.

Car la situation est de nature très différente pour l'Espagne et l'Italie. La première connaît une crise bancaire et la seconde est confrontée à des problèmes de bureaucratie mais possède un tissu industriel solide et dynamique...

Une sortie de la Grèce n'implique donc pas nécessairement que ces deux pays devraient suivre la même voie. J'ignore bien sûr si l'euro survivrait ou non à un tel changement, mais une sortie ordonnée de la Grèce de l'euro ne serait assurément pas le désastre qu'on nous prédit.

Ce qui est sûr, c'est que plus nous attendons, plus nous sacrifions de générations en Grèce.

(Recueilli et traduit par Elisa Perrigueur, à Athènes)

La Tribune





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